Patrick
Eudeline avec son phrasé syncopé, sa musique noire
et ce personnage (mi-joué, mi-rêvé) s'est naturellement
imposé comme l'un des plus brillants artistes de notre époque.
L'écrivain de génie ( Dansons sous les bombes, Ce
siècle aura ta peau) a fait place pour un temps au musicien
théoricien et jouissif. En effet il vient de sortir un remarquable
album, Mauvaise étoile, qui mérite l'extrême-onction.
Dieu n'est jamais loin de ce garçon car il en est son meilleur
prophète
Est-ce
que cette mauvaise étoile ne fut pas ton meilleur atout pour
vivre encore maintenant ?
C'est possible ! C'est vraiment possible quand tu vois tous ces
groupes des sixties qui ont faits plein de disques et qui à
un moment n'ont plus d'inspiration. Ma biographie particulière
avec ce trou dans les années 80, suite à la dissolution
de mon groupe Asphalte Jungle lorsque je n'ai pas poursuivi sur
cette voix, a du m'aider d'une certaine manière. J'ai longtemps
cru être talonné par la malchance ! Je m'intéressais
beaucoup à l'occultisme alors tout ça se mélangeait.
C'est un truc de magie élémentaire, le noir rejoint
le blanc. Ma mauvaise étoile est finalement peut être
le moyen de toucher la bonne étoile !
Tu
disais un jour qu'écrire sur la musique était
bien mais qu'à un moment ou à un autre il fallait
aller se frotter à la création ?
C'est une expérience que je tenais à partager
de l'intérieur. Dès le début, quand j'ai
commencé à écrire, je le vivais intensément.
Je voyais ça comme une expérience à partager
! Maintenant je le pense en musicologue. C'est à dire,
faire attention, connaître mon affaire et quand j'en parle
connaître de quoi je parle. Je n'aime pas le mot journaliste
quand ça touche au rock, à la musique. Un journaliste
ne peut pas parler de rock. C'est quelque chose qui peut se
vivre de l'intérieur. |
|
Quelle
est la différence entre le chanteur, l'écrivain et
le portraitiste que tu es ?
Je ne mets pas tellement de barrière entre un roman, un papier
ou une chanson. La forme la plus exigeante est la chanson ! C'est
une forme très ramassée. Tu as des obligations techniques
par rapport au rythme, à la rime. J'ai l'impression de faire
la même chose. C'est la forme qui change mais c'est toujours
de l'écriture. C'est toujours moi qui parle ! Tu vois bien,
je n'écris plus sur le rock que dans Rock & Folk. Et
encore ! Principalement des portraits ! En général
ce sont des choses à la première personne, sur des
gens que j'ai connu personnellement et des histoires vécues
que j'ai envie de faire partager. J'espère avoir un rôle
de passeur.
Quand
je vois que tu fais le dossier de presse de Steve Estatoff nous
avons un peu l'impression que tu ne passes pas grand chose ?
Je me justifie ! En trente ans tu ne peux pas avoir un contrôle
sur tout mais là Steve est venu ici, chez moi, il a pris
une guitare et a joué dignement du Dylan. On s'était
rencontré sur une émission de télé et
j'ai pensé que ce type, humainement, était vrai. Il
a choisi de faire la pop-star parce qu'il en avait marre de galérer
depuis quinze ans. De quel droit critiquerait-on ce moyen d'y arriver
? Le disque, il est vrai, je ne le trouve pas très bon !
Quand on m'a demandé de tracer un portrait de lui je savais
bien qu'on m'utilisait comme caution ! Mais quand il reprend des
chansons du répertoire comme " Le Sud " de Nino
Ferrer et qu'il la " nirvanise " un peu comme Syd Vicious
reprenait " My Way ", je trouve que c'est bien. Je me
doutais bien que ce serait mal interprété
As-tu
conscience de la marque de fabrique Eudeline ? Est-ce que ce sceau
peut être exploité ?
Suite
|